mercredi 21 décembre 2016

sweet home

De chez moi, je ne vois que le ciel. Certes, si je me mets sur la pointe des pieds, je vois les toits, les antennes, les lumières, et un bout du clocher du village. Au loin la campagne.
Le monde ne rentre pas chez moi. Je suis calfeutrée, coupée de la vie extérieure et comme seul horizon, la lourdeur du ciel d'hiver. Des rumeurs montent d'en bas, ici un moteur, là des voix humaines, un chien qui aboit, la cloche qui sonne le glas. J'allume la radio pour me sentir humaine. J'éteins. Le silence est étonnant. assourdissant. Je vois les pigeons, assis sur les toits, qui volent, dorment debout, picorent et se font des bisous. J'écoute ma pulsation. Est ce que je vis encore ? Ah oui. Mon cœur bat. Une bonne chose. Je me désagrège dans la solitude. Mes atomes sont constitués, mes globules se reproduisent, mes synapses fonctionnent, mes yeux voient, mais je disparais de ma propre vision. Je me sens folle. Dédoublée. Je me regarde de l'extérieur. Je m'épies. Je me demande ce que je fais là. Sur cette terre. Cette question existentielle qui vit avec moi tous les jours depuis que mon cerveau est opérationnel. Quel est le sens de tout ça ? moi ? le pigeon ? le chien qui aboie ? la femme que j'aime ? toi qui me lis ? quel est ton but ? Ton sens ? Te poses tu la question ? le pigeon lui, non. J'aurais aimé être un pigeon. A défaut d'être une artiste.
Je me pose la question au feu rouge, à Rennes, il pleut et il fait nuit, et les lumières sont déformées par mes vitres mouillées. Hubert Reeves a peut etre la réponse ? ou Boris Cyrulnik ? ou mon ami R. le joueur d'échecs ?
Certains me diront "il faut être heureux, il faut profiter de chaque instant, le temps passe vite". Le temps passe vite et vient la mort. L'injonction d'être heureux m'a toujours pesé, comme un âne de bât qui porte mille bagages et qui doit gravir la montagne. Et tout le monde pense que c'est simple pour l'âne. Or, c'est dur pour tout le monde. Vivre est dur. Ne pas vivre est pire.

J'ai besoin de cet espace clos. C'est pour ça que je suis là. Pour apprendre à ne pas me perdre entre 4 murs. Pour me regarder dans le miroir et ne pas y voir une étrangère. Me reconnaitre et ne pas savoir qui suis je.
Je cherche mon Moi, avec comme horizon des toits et du ciel. 
Ironie du sort. 

Jules.

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